Drainage en zone de marais : une condamnation exemplaire

Jeudi 2 juin 2022, la formation correctionnelle du Tribunal judiciaire de La Rochelle a prononcé une sanction exemplaire à l’encontre de Monsieur Jérémy Boisseau, agriculteur et Maire de la commune de Charron (17230), pour avoir procédé à des travaux de drainage enterrés sans autorisation en zone de Marais poitevin.

Entre 2010 et 2015, vingt-deux exploitants agricoles, dont le prévenu, avaient déjà procédé illégalement à des drainages sur plus de 600 hectares en zone de Marais poitevin. L’intervention de Nature Environnement 17 a permis de faire reconnaître juridiquement la nature de marais des parcelles asséchées.

Presque dix ans après, et malgré des mises en demeure préfectorales, aucun des exploitants n’a procédé aux régularisations administratives exigées, notamment pour éviter de devoir mettre en œuvre des mesures compensatoires.

La réitération des faits entre 2017 et 2018 sur 21 nouveaux hectares par l’élu local a justifié les suites pénales à son encontre.

De tels travaux n’ont pour but que d’accroitre la surface cultivable des exploitations et d’augmenter le montant des aides reçues au titre de la PAC, au détriment de l’environnement.

En effet, les drainages enterrés assèchent les zones de marais, modifient leur régime hydraulique, dégradent les sols et impactent les écosystèmes aquatiques. De tels travaux suppriment durablement des surfaces en eau libre, diminuant les potentiels de restauration de la biodiversité. L’eau se retrouve moins disponible localement pour la faune et la flore typiques de ces milieux. Par ailleurs, les drainages enterrés rendent plus difficile le rechargement des nappes phréatiques, enjeu d’importance capitale dans le contexte local de sécheresse chronique.

Le Marais poitevin est particulièrement touché par cette problématique alors que la France s’est engagée auprès de l’Union européenne à reconquérir 10 000 hectares de prairies humides.

Tandis que Monsieur Boisseau se congratulait à l’audience d’avoir amélioré l’état écologique des parcelles, les magistrats du siège ne se sont pas laissés duper. Le céréalier a été reconnu coupable des faits reprochés. Le jugement énonce ainsi :

« Cette attitude, pour un élu d’une commune agricole tenu à un nécessaire devoir d’exemplarité dans un contexte environnemental d’incertitudes climatiques et de tensions sur la ressource en eau, eu égard au montant de ses ressources mensuelles de l’ordre de […] conduira à sanctionner M. BOISSEAU par une amende d’un montant de 15.000€, dont 10.000€ assortis d’un sursis »

Mieux encore, la juridiction a prononcé des peines complémentaires permettant une réelle efficacité du droit répressif de l’environnement : obligation de remise en état des lieux à l’identique dans un délai de 9 mois sous astreinte de 500€ par jour au-delà du délai et diffusion hebdomadaire d’un communiqué informant le public de la nature des faits et de la présente condamnation pendant deux mois dans le journal Sud Ouest.

La constitution de partie civile de Nature Environnement 17, engagée depuis des années sur ces dossiers, a été accueillie. Son préjudice a été indemnisé à hauteur de 8 400€ outre 600€ de frais de justice.

Nature Environnement 17 ne peut qu’approuver cette sanction. Il est heureux que la justice pénale se soit emparée des problématiques environnementales présentes sur le département de la Charente Maritime et qu’une protection forte se construise autour des zones écologiquement sensibles.

 

 

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