Les zones humides boisées : elles stockent, régulent, épurent … Préservons-les !

Au même titre que les forêts tropicales ou les récifs coralliens, les marais seraient parmi les zones écologiques produisant le plus de biomasse, au contraire des cultures intensives dominant parfois notre paysage. Les fonds de vallée retiennent l’eau en hiver et la restitue peu à peu aux cours d’eau, composant de formidables stations d’épuration naturelles. Depuis plus de trente ans on annonce prendre en compte les services qu’elles rendent à la société et leur attribuer une valeur économique. Elles sont un lieu de grande diversité biologique et le point de départ de multiples chaines alimentaires pour des espèces de grande valeur patrimoniale de faune et de flore, et forment de merveilleux corridors biologiques. La disparition de ces espèces impose de prendre de réelles mesures de protection (dans ces zones humides, plus de 75% de la biomasse des insectes volants ont disparus selon une étude du ministère de la transition écologique).

On estime qu’environ 2,5 millions d’hectares de zones humides ont disparu en France depuis le début du 20ème siècle. La mise en culture de vastes espaces de marais a été spectaculaire lors des remembrements. Plus discrète est la disparition de petites zones humides, prairies et ripisylves, situées en tête des cours d’eau, dont le rôle est essentiel pour la qualité de l’eau et pour la vie de la rivière. Ce sont dans les régions d’agriculture intensive, où elles sont le plus utiles, que ces zones humides ont le plus régressé. Il est urgent de les conserver et les restaurer.

Ce sont des zones d’expansion de crue qui deviennent indispensables dans un contexte de changement climatique et de phénomènes de précipitations que nous connaissons ; l’eau s’étale dans la plaine alluviale, ralentit sa course pour s’infiltrer en partie et recharger les nappes souterraines.

Dans le bassin de la Boutonne, quand on n’a pas pu drainer, on a planté des peupliers. Pourtant dans les milieux ouverts l’implantation d’une populiculture provoque la réduction du nombre d’individus de certaines espèces végétales menacées ou protégées (laiteron des marais, euphorbe des marais, etc.) en raison de la diminution de l’éclairement du sol, ce phénomène peut conduire à la disparition totale d’espèces sur le site, appauvrissant la biodiversité locale originale.

Il est dommage de ne pas tirer parti du peuplement naturel existant par l’amélioration et la régénération naturelle, pour finalement y implanter des peupliers. Sur la Boutonne, la populiculture se réfère à une charte qui n’est basée que sur le volontariat mais qui n’impose surtout aucune contrainte règlementaire (traitements chimiques, fauche, exploitation). Le faible enracinement en profondeur du peuplier entraine l’instabilité et l’érosion des berges ainsi que la diminution de l’absorption racinaire dans la nappe, ce qui diminue la capacité d’auto-épuration et donc la baisse de la qualité de l’eau par rapport au boisement naturel. Le paysage est modifié, et l’absence de sous-bois baisse la capacité d’accueil en espèces animales inféodées aux zones humides, appauvrit la flore et provoque une diminution générale de la biodiversité.

Des coupes rases de secteurs boisés, parfois classés, nous ont encore été signalées sur les communes d’Antezant La Chapelle, Dampierre sur Boutonne, Saint-Pardoult, Nuaillé sur Boutonne, Saint Julien de l’Escap, Les Nouillers…. Mais le pire reste les dégradations provoquées par les machines des exploitants qui défoncent les sols, les berges et qui vont parfois jusqu’à descendre dans la rivière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous restons impuissants devant ces dégradations tellement nombreuses. Que font les autorités, les maires, les syndicats de rivières, les CLE de SAGE, la DDTM, les Agences de l’Eau, les porteurs de Projets de Territoire ? Cette inaction est aberrante quand il est répété depuis 30 ans qu’il faut protéger les zones humides ! Mais ces dernières ont souvent mauvaise réputation, et les maires ont tendance à préférer un bel alignement de peupliers à une zone naturelle boisée non entretenue. Conséquence : les peupleraies continuent de grignoter ces formidables espaces boisés, pourtant essentiels au bon fonctionnement de nos écosystèmes. Agissons pour préserver ces zones humides méconnues, et luttons pour préserver la biodiversité qui en dépend.

Catherine et Jean-Louis DEMARCQ
Bénévoles NE17
et administrateurs de SOS Rivières et Environnement

 

Photos 1 et 2, commune de Nuaillé sur Boutonne, Crédit @Gueydon
Photos 3 et 4, coupes de peupliers au ras de la Boutonne, Crédit @Demarcq

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