Société INNOV’IA à La Rochelle : risques industriels et infractions se poursuivent !

Société INNOV’IA à La Rochelle : risques industriels et infractions se poursuivent !

Multiples entorses à la règlementation, pollutions répétées …
Les infractions persistent malgré les nombreuses mesures prises à l’encontre de la société.

La société INNOV’IA fait l’objet, depuis plusieurs années, d’interventions répétées des services de l’État, mais aussi de celles des associations de protection de l’environnement pour ses multiples entorses à la réglementation qui, pour certaines d’entre elles, relèvent de la mise en danger d’autrui.


Rappel du contexte

INNOV’IA, installation classée pour l’environnement (ICPE) sur la commune de La Rochelle, est spécialisée dans le façonnage industriel de poudres et d’ingrédients pour l’industrie agroalimentaire, la cosmétique, l’industrie pharmaceutique et la chimie fine. Cette ICPE est implantée sur deux sites différents à La Pallice, à proximité de la plage de Chef de Baie : le site PREMIUM soumis à déclaration depuis 2006, et le site AGROCEAN, à quelques centaines de mètres du premier, soumis à autorisation par arrêté préfectoral de 2015. Ces 2 sites ont les mêmes activités.

La société ayant à façonner différents types de produits, elle doit, entre chaque production, procéder à des nettoyages de ses machines nécessitant plusieurs lavages et rinçages, ce qui entraîne de fortes consommations d’eau. Ces eaux sont ensuite renvoyées dans le réseau municipal des eaux usées. Les 2 sites sont en outre dotés de plusieurs tours de séchage équipées de laveurs d’air permettant en principe d’éviter les rejets pollués dans l’atmosphère.

Peu avant 2015, cette société souhaitant augmenter ses capacités de production, présente un dossier de demande d’autorisation d’extension de son site AGROCEAN en préfecture, mais sans attendre la réponse de cette dernière – fait construire une nouvelle tour de séchage et « omet » de déclarer à l’Inspection des Sites Classés l’utilisation d’un forage d’eaux souterraines sur son site. Car son besoin en eau est aussi grandissant. Elle doit alors présenter un nouveau dossier d’autorisation et après régularisation pour changement de régime, un nouvel arrêté préfectoral est pris le 20 mai 2015.

Depuis cette date, les infractions dont va se rendre coupable INNOV’IA ne vont cesser de se multiplier.


Des faits de pollution avérés et répétés

Le 19 octobre 2016 : pollution du réseau d’eaux pluviales de la CDA de La Rochelle à l’hydrogène sulfuré (H2S). Les mesures effectuées au-dessus des avaloirs d’eaux pluviales révèlent alors des teneurs en H2S supérieures à 200ppm (alors que le seuil d’effets irréversibles pour les humains est de 150ppm.) Il faut savoir qu’une exposition supérieure à 15 minutes à de telles quantités est mortelle.

Réaction rapide des services de l’État avec la prise de 2 arrêtés préfectoraux (AP) de mesures d’urgence suivis d’une mise en demeure de respecter l’arrêté de 2015, sous peine de sanctions.

Septembre 2017 : nouvelle pollution du réseau d’eaux pluviales de la CDA à l’hydrogène sulfuré. Visite inopinée des inspecteurs de la DREAL, prélèvements de produits et analyse des rejets d’INNOV’IA.

Par suite, prise d’un arrêté préfectoral complémentaire interdisant les rejets d’eaux pluviales dans le réseau communal. C’est la première fois qu’une telle mesure est prise contre une ICPE de la zone industrielle et portuaire de La Pallice. La DREAL avait pourtant encouragé la recherche d’une solution de recyclage des eaux pluviales d’INNOV’IA intégré à son processus de production en l’encadrant d’un arrêté préfectoral, mais la démarche n’a jamais été suivie par l’exploitant

Dès la fin 2017, les infractions à la réglementation sur l’usage de l’eau du réseau public et sur les normes de rejet des eaux usées de l’ICPE vont se multiplier, sans qu’INNOV’IA ne s’efforce d’y remédier.

 

Des pratiques et des consommations d’eau irrationnelles

Rappelons que la consommation d’eau par INNOV’IA provient d’une part du réseau public de la ville de La Rochelle, et d’autre part des eaux souterraines.

En 2017, la consommation d’eau de l’installation via le réseau public va ainsi atteindre un total de 114 705 m³ (total des 2 sites).

A cela il faut encore ajouter les ponctions conséquentes sur les eaux souterraines issues des 2 forages que possède l’exploitant (et dont un est inconnu de l’administration car non déclaré !). Pour 2017, la consommation annuelle des eaux souterraines s’élève à 21 431 m³ pour AGROCEAN (et 14 567 m3 pour le site PREMIUM) alors que le volume autorisé en prélèvement est de 9 000 m³ maximum. Pour 2018 la consommation sur le forage AGROCEAN s’élèvera même à 30 811 m³ ! Celle du forage du site PREMIUM est inconnue.

En 2019, la consommation en eaux souterraines de l’ICPE est le triple du volume autorisé. Par courrier du 29 Juillet 2019, Nature Environnement 17 alerte les services de la DREAL sur ces dépassements illégaux et demande qu’INNOV’IA soit mise en demeure de s’en tenir aux 9000 m³ autorisés. Un arrêté préfectoral est signé en ce sens le 30 Juillet 2019.

Circonstance aggravante, les pompages dans la nappe souterraine ont fini par occasionner des remontées d’eaux salines dans la nappe souterraine ainsi que le constate l’étude du BRGM de septembre 2019. Ces intrusions salines (11g/l) ont malheureusement un effet irréversible sur les eaux de la nappe.

Les services de l’État exigeront d’INNOV’IA, en novembre 2019, la remise de données complémentaires sur les 2 forages, au vu de l’irrégularité flagrante de la situation, avec un délai de 3 mois, soit fin février 2020. Nouvelle mise en demeure à laquelle les dirigeants d’INNOV’IA ne répondront même pas.

 

Difficultés de gestion des rejets d’eaux industrielles

De tels niveaux de consommation d’eau du réseau public et d’eaux souterraines et l’attitude irresponsable de l’exploitant dans la gestion de ses activités, entraînent de toute évidence des difficultés de gestion des eaux industrielles pour la communauté.

Depuis mars 2017, INNOV’IA dispose de 2 conventions de rejet de ses eaux industrielles (une pour chaque site) dans le réseau de collecte et de traitement des eaux usées de la CDA de La Rochelle.

Mais dès le début de l’année 2018, la CDA, responsable de la station d’épuration (STEP) de Port Neuf, constate la présence de pollutions en entrée de station, ce après une campagne de prélèvements effectués en zone AGROCEAN. Les concentrations en DCO (Demande chimique en oxygène) dépassent de 3 à 7 fois les valeurs admises imputables aux 2 sites industriels d’INNOV’IA. L’épisode se produit 2 fois de suite en 2018.

De tels flux de pollution, équivalents à 1/5ème de la capacité d’épuration de la STEP imposent à celle-ci des astreintes inacceptables en termes de gestion des eaux usées d’une ville de 75 500 habitants hors agglomération.

L’Inspection des Installations Classés exige alors de l’exploitant la remise d’une étude d’incidence visant à réduire ces flux de pollution. Ladite étude est remise avec plus d’un an de retard en septembre 2019. La CDA est sollicitée pour avis sur les nouvelles propositions de l’exploitant concernant les valeurs de rejet : elle indique alors par courrier du 30 octobre 2019 que ces valeurs ne sont pas acceptables par le système d’assainissement.

L’Inspection des Installations Classés, considérant l’étude d’incidence comme irrecevable, rejette les propositions de l’exploitant. INNOV’IA fera l’objet de 2 nouvelles mises en demeure de respecter les valeurs limites définies dans son arrêté d’autorisation de 2015.

Le Préfet de la Charente-Maritime a laissé à l’exploitant jusqu’à fin Mars 2020, comme nous l’a précisé la DREAL, pour se conformer aux prescriptions de ces dernières mises en demeure.

Par courrier du 2 Mars 2020, Nature Environnement 17 a contacté le Président de la CDA de la Rochelle afin de savoir quelle décision avait été prise suite à leur avis du 30 octobre 2019 concernant les agissements « inacceptables » de la société INNOV’IA.

A ce jour, aucune réponse ne nous est parvenue. Mutisme pour le moins surprenant du Président et du Maire de La Rochelle, si l’on en juge par la fermeté apparente des propos tenus par sa représentante, Me Sophorn GARGOULAUD, lors de la séance du CODERST du 14 Mars 2019, séance au cours de laquelle elle déclarait à l’encontre du Directeur de l’ICPE objet des débats : « La ville ne peut plus tolérer les pollutions d’INNOV’IA, les odeurs incommodant les riverains et les touristes. Il faut que cela cesse si vous voulez que la ville continue à travailler avec vous ». Cet avertissement officiel ne semble pourtant pas avoir été suivi d’effets concrets.

 

Ainsi, considérant les faits cités plus haut, ainsi que :

– l’absence totale et répétée de respect des dispositions prévues par la loi dont l’exploitant fait preuve depuis plus de 5 ans,

– les consommations abusives et inacceptables en eau du secteur public destinée avant tout à la consommation humaine aux termes de la loi sur l’eau,

– le refus de se conformer aux prescriptions des 4 arrêtés préfectoraux de mise en demeure pris à son encontre,

– les infractions répétées au Code de l’Environnement et actes de pollution ayant impacté des installations publiques communales avec risque de mise en danger d’autrui,

– considérant en outre les délits répétés dont l’exploitant s’est rendu coupable,

L’association départementale de protection de l’environnement NATURE ENVIRONNEMENT 17 demande à ce qu’en l’état actuel des choses, Monsieur le Préfet de Charente-Maritime interdise l’accès à la station d’épuration de Port-Neuf des eaux industrielles de la société INNOV’IA, ce, tant que cette ICPE ne se conformera pas aux arrêtés qui réglementent ses activités et, notamment, au respect des valeurs limites de rejet dans le réseau communal d’eaux usées de La Rochelle, ainsi qu’aux demandes largement réitérées des services de l’État de leur transmettre les informations exigées quant aux deux forages exploités sur le site de l’ICPE.

 

Contact :
René BARTHE, administrateur NE17, référent risques industriels
rn.barthe(at)gmail.com – 06 18 16 90 74

Marine LE FEUNTEUN, Chargée de mission juridique
juridique(at)ne17.fr